Espace ou stratosphère ?
A mesure que l'espace devient une destination de plus en plus accessible, les entreprises commencent à s'y intéresser de près. Personne ne veut manquer le coche pour ne pas prendre de retard dans ce secteur d'activité prometteur. J'en ai eu la preuve lors de la dernière conférence donnée dans le domaine, à laquelle mon entreprise m'a envoyé. La plupart des séminaristes présents avaient été « parachutés » là comme moi, sans même savoir ce qu'ils venaient y chercher. C'est ainsi que j'ai assisté à une conférence sur l'histoire des fameuses fusées allemandes. Si les informations n'y étaient d'aucune utilité professionnelle, je dois admettre que l'orateur a su nous tenir en haleine tout du long. Très en avance dans le domaine de la motorisation par réaction, les allemands furent les premiers à utiliser cette technologie sur leur fameuse fusée V1 (V pour Vergeltungswaffe : arme de représailles). Initialement designée Fieseler Fi-103, du nom de l'entreprise d'aviation allemande, l'équipe de Robert Lasser se basa sur les travaux que Fritz Gosslau avaient effectués au sein de la firme Argus Motoren Gesellschaft. Il avait ainsi réussi à produire des moteurs de 3 500cv. Du premier tir d'essai, le 25 décembre 1942, en 2 ans les V1 passèrent à la production en série dans une cinquantaine d'usines. Sur les 35 000 fabriquées, de nombreuses bombes durent détruites lors des bombardements alliés mais à partir du 13 juin 1944, 9251 décollèrent tout de même et 6551 furent larguées depuis des avions sur l'Angleterre et en direction d'Anvers. Heureusement, leur vitesse de 650km/h et leur trajectoire rectiligne permetttait quelques interceptions par les batteries anti-aériennes et les chasseurs les plus rapides. Une version pilotée, la V4, fut aussi testée, entre autre par Hann Reitsch. Le pilote devait sauter en parachute avant l'impact mais s'apparentant à une mission suicide, le projet fut abandonné. A la fin de la guerre, les américains en récupèrent des exemplaires et sous l'appellation JB-2 Loon, ils les expérimentèrent jusqu'en 1950 comme missiles lancés principalement depuis des navires de guerre. Un modèle plus imposant, l'A4, ultérieurement nommé V2, fut développé également par les allemands dans l'usine expérimentale de Peenemünde, sous la direction de l'ingénieur Wernher von Braun. Les tirs du 13 juin puis du 16 août 1942 furent des échecs. Le premier vol eut ainsi lieu le 3 octobre, et un quatrième prototype modifié dans la journée réussit à parcourir 192 km atteignant 85 km d'altitude. Même s'il s'agissait d'un engin de mort, ce jour-là l'histoire de l'humanité fit un bond : l'espace pouvait être atteint et ouvrait la voie à la conquête spatiale. A mon sens, la voie spatiale ne sera pas vraiment ouverte avant plusieurs années. Il faut évidemment s'y intéresser pour ne pas manquer la « fenêtre de tir », mais d'autres initiatives, déjà à l'oeuvre, pourraient représenter un investissement à plus court terme, ce qui me paraît essentiel dans le contexte actuel. J'ai par exemple appris par hasard, entre deux conférences, que des entreprises proposent déjà du vol en avion de chasse, en réutilisant d'anciens modèles démilitarisés. Voilà un secteur d'activité qui mériterait une étude plus approfondie, et qui me paraît moins dangereux que la « bulle » spatiale.